2e ligne de tramway : son tracé et son financement interrogent les Tourangeaux

Les réunions publiques se suivent, mais ne se ressemblent pas. La 2e ligne de tramway était présentée ce mardi aux habitants de Tours. Sur fond d’inquiétude des riverains du boulevard Jean Royer, les questions ont été nombreuses. Elles ont notamment porté sur la desserte des hôpitaux et sur le coût du projet. Compte rendu des débats.

Des 6 réunions publiques planifiées par l’équipe du projet de la 2e ligne de tram, celle de Tours était sans doute la plus attendue. La raison ? Une modification de son tracé intervenue en 2022 avec un abandon de l’option Béranger au profit du boulevard Jean Royer, suscitant le mécontentement d’une partie des riverains de cette artère.

Le rendez-vous était donc donné ce mardi soir à 18h30 au 1er étage des halles de Tours. A la différence des précédentes rencontres à Chambray-lès-Tours et La Riche, elle était loin d’être remplie. Une centaine de personnes avaient tout de même fait le déplacement.

La première prise de parole était réservée à Emmanuel Denis en sa qualité de maire de Tours, Vice-président de Tours Métropole et Président du syndicat des mobilités de Touraine (SMT). Il a rappelé que la réalisation de ces 2 nouvelles lignes – une de tramway et une de bus à haut niveau de service (BHNS) – s’inscrit dans un schéma de mobilité global.

En complément de l’amélioration des infrastructures cyclables, piétonnes et de l’offre du réseau Fil Bleu, l’édile s’est attardé sur le service express régional métropolitain (SERM). A ce titre, la gare de Fondettes-Saint-Cyr-sur-Loire devrait rouvrir d’ici l’année prochaine.

Coup de projecteur sur la végétalisation

La directrice du SMT, Soazic Le Guen, a poursuivi avec une présentation du projet baptisé « Lignes2Tram ». Anticipant certaines questions du public, elle a détaillé son montage financier et le calendrier prévisionnel avant de laisser la parole à Valérie Dubreuil.

Soazic Le Guen, directrice du SMT

Comme lors des précédentes réunions, la directrice du projet pour l’entreprise Transamo a pris le temps de détailler l’insertion du tramway dans toutes les rues de la commune. Un exercice indispensable, mais ardu compte tenu de la piètre qualité des plans vidéoprojetés.

L’accent a été mis sur les importants efforts de végétalisation qui seront réalisés le long de cette nouvelle ligne. Le réaménagement de la place de la Liberté et Hélène Boucher, au sortir du quartier des casernes Beaumont-Chauveau, sont cités en exemple.

Avec l’arrivée de la 2e ligne, la place de la Liberté est amenée à changer de visage (document Lignes2Tram)

Contrairement à la 1re ligne, la plateforme du tramway – majoritairement végétalisée – ne sera quasiment plus arrosée. Seuls 5 secteurs comptant parmi les plus exposés au soleil seront tout de même irrigués. Un moyen de faire taire les critiques concernant la coupe aussi malheureuse que nécessaire des arbres du boulevard Jean Royer ? Possiblement.

Quel avenir pour le boulevard Jean Royer ?

La stratégie s’est visiblement avérée payante. Personne dans le public n’abordera le sort de l’alignement planté. Selon Transamo, des parcelles végétalisées du type « A Fleur de Trottoir » les substitueront. Cela ne signifie pas pour autant que le cas du boulevard Jean Royer n’a pas suscité le débat lors de la séance des questions. Ses riverains étaient venus en nombre et n’ont pas manqué de le faire savoir.

Comme lors de la réunion publique de La Riche, le Collectif boulevard Jean Royer a organisé une distribution de tract sur place. 3 de ses membres ont partagé avec les élus leur vive inquiétude quant à l’évolution du plan de circulation et de ses impacts sur le stationnement automobile dans leur quartier.

Le boulevard Jean Royer tel qu’il est projeté à la mise en service du tram en 2028

Outre l’invitation des équipes techniques à leur présenter les modifications envisagées en fin de réunion, le conseiller municipal de la Ville de Tours délégué aux mobilités, Christophe Boulanger, a expliqué la profonde métamorphose du boulevard Jean Royer qui en aura bientôt fini avec les flux de transit. De 7000 véhicules quotidiens, il est prévu de passer à 700 lors de la mise en service du tramway. Afin d’y parvenir, certains tronçons ne seront plus circulables pour les automobilistes. Les continuités piétonnes et cyclistes seront bien sûr assurées.

La desserte locale se fera donc sur une voie mixte partagée entre le tram et les voitures. Cela devrait également avoir pour effet de réduire la pression sur le stationnement. Une accélération du report modal vers d’autres solutions de transport est attendue du même ordre que celui observé pour la 1re ligne.

Christophe Boulanger, Soazic Le Guen, Valérie Dubreuil et Emmanuel Denis

En réponse à une puéricultrice redoutant des nuisances pour elle et ses enfants, Valérie Dubreuil a voulu se montrer rassurante en exposant l’ensemble des mesures d’atténuation prises dans ce secteur. Les niveaux sonores seront conformes à la réglementation en vigueur et la plateforme sera dotée d’un tapis antivibrations.

Une attention toute particulière semble également être apportée à l’intégration des stations dans l’espace public. Elles seront 2 à ponctuer le boulevard Jean Royer : place Sidi Brahim et de Strasbourg. Leur mobilier sera réduit au minimum avec seulement un distributeur de titres de transport pour les 2 quais. Ces derniers se confondront avec le trottoir, sur le modèle des stations existantes de la rue Nationale.

Exit la « liaison hospitalière »

Chez d’autres citoyens, une remise en cause plus globale s’est aussi fait entendre. « Où est passé le « tramway sanitaire » promis par Philippe Briand, alors Président de Tours Métropole, lors de la concertation de 2018 ? », s’est étonné l’un d’eux. Selon les dires d’Emmanuel Denis, il ne serait plus d’actualité. Il faut bien dire que la liaison entre les 2 hôpitaux Bretonneau et Trousseau – jadis au coeur du projet – a du plomb dans l’aile.

Cela n’a pas manqué d’être souligné par un fin connaisseur du dossier qui défend de longue date une alternative par le boulevard Tonnellé, et ce, afin d’améliorer l’accessibilité des sites hospitaliers. « Le potentiel de fréquentation par Tonnellé était inférieur et l’insertion du tram présentait aussi d’importantes contraintes », a d’emblée précisé Christophe Boulanger. Emmanuel Denis a quant à lui rappelé que le nouvel hôpital Trousseau (NHT) se rapprocherait de l’avenue de la République où circulera le tramway. Au sujet de Bretonneau, il reconnait que la desserte ne sera pas optimale.

Avant d’être interrompu dans sa prise de parole probablement un peu trop longue, ce même habitant a imploré les décideurs d’améliorer la liaison entre La Riche et le centre-ville de Tours. Il a pointé là une des faiblesses majeures de cette 2e ligne, alors qu’il sera techniquement possible de faire circuler des tramways entre La Riche et Vaucanson dès 2028.

Cette requête recevra une fin de non-recevoir de la part d’Emmanuel Denis. Le Président du SMT préfère parler d’intermodalité plutôt que de rupture de charge ou de correspondance. Il explique qu’un billet unique pour les bus Fil Bleu et les trains du quotidien verra bientôt le jour. « Plus de bus pourront desservir La Riche à l’avenir », a-t-il également ajouté.

Un coût qui inquiète

Cette réponse est d’autant plus étonnante que cette nouvelle ligne s’annonce, encore, comme l’une des plus chères de France. Son coût est estimé à 462 millions d’euros. Une somme à comparer aux 250 millions dépensés par nos voisins angevins pour leurs 2e et 3e lignes inaugurées l’été dernier. De quoi susciter quelques questions dans la salle.

Citons par exemple cette femme qui redoute une hausse de la fiscalité. L’augmentation du versement mobilité – une contribution des employeurs pour financer les transports – serait à l’étude pour ce projet qui, comme l’ont rappelé les élus, est d’intérêt métropolitain. La recherche de financements supplémentaires est en cours.

L’objectif est d’aller au-delà des 66,6 millions d’euros déjà promis par l’Etat. Emmanuel Denis en a profité pour souligner que le réseau Fil Bleu est l’un des rares en France à entièrement s’autofinancer, notamment grâce à ses excellents résultats de fréquentation. Cela signifie que Tours Métropole Val de Loire ne débourse pas le moindre euro pour son fonctionnement.

Quid du BHNS ?

« Créer 2 lignes de BHNS n’aurait-il pas été plus raisonnable ? », s’est interrogé un Tourangeau. A cette question récurrente, il est toujours utile de préciser que chaque mode de transport répond à un besoin précis. Ce qui a donc été fait. Malgré un coût d’investissement plus attractif, le fonctionnement du BHNS s’avère vite onéreux. Le tout en ne proposant pas le confort et la capacité d’un tramway, encore moins son caractère structurant.

Il reste que le BHNS constitue souvent une excellente préfiguration pour un futur tramway. C’est le cas aujourd’hui avec le « 2 Tempo » à Chambray-lès-Tours. En raison de la mise en service de la ligne B en 2028, ce parcours à haut niveau de service évoluera. Si au nord de la Loire rien ne changera, son terminus sud sera réorienté vers le centre commercial « Les Atlantes » à Saint-Pierre-des-Corps.

Les autobus articulés récemment mis en service circuleront sur la future ligne 2 Tempo

Ce nouvel itinéraire sera l’occasion de réaliser d’importants travaux de voirie, parfois de façade à façade, comme cela sera le cas avenue du Général de Gaulle à Tours. Les sens de circulation pourraient également être amenés à évoluer.

C’est en tout cas ce que demandent certains riverains du tracé. A l’image de cette riveraine de la rue Mirabeau qui a plaidé ce mardi pour un apaisement de cette artère très routière. « Des études sont en cours dans le cadre du plan d’apaisement », lui a répondu Emmanuel Denis avant de conclure et d’inviter le public à participer aux prochains temps forts.

Avant l’enquête publique qui démarrera à la mi-septembre pour une durée d’un mois, 2 réunions publiques doivent encore se tenir :

  • Mercredi 26 juin à Joué-lès-Tours à 18h – Espace Clos Neuf – salle 1903, 2 rue du Clos Neuf ;
  • La réunion publique de Saint-Pierre-des-Corps, initialement prévue le mardi 2 juillet, est reportée à une date ultérieure.